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  • Montaigne ou Dieu que la femme me reste obscure.

    Texte paru à l' AVANT-SCENE théâtre en 1992 - n° 909 - sous le titre,

    " Parce que c'était lui, parce que c'était moi."

    N° spécial consacré à l'auteur )

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    L'action se situe dans les dernières années de la vie du grand humaniste lequel nous est montré entouré de sa femme Françoise de la Chassaigne et de sa fille d'alliance Marie de Gournay Le Jars. Pièce intimiste par excellence dans un style aux répliques savoureuses, l'histoire d'une solitude celle de l'homme qui fait passer l'écriture avant tout et duos successifs entre Montaigne et Françoise, Montaigne et Marie. 

    L'une et l'autre rivalisent de charme auprès de cet homme vieillissant, rongé par la maladie, cerveau agile mais homme pondéré et semble t-il, piètre amant.

    Françoise avec amertume et tendresse à la fois exprime toutes ses déceptions, ses griefs et révèle ainsi à son époux que la femme lui reste obscure; Marie elle, tente vainement de supplanter dans l'esprit de son grand homme le cher disparu, l'irremplaçable Etienne de la Boétie, inspirateur du célèbre " parce que c'était lui, parce que c'était moi."

    Ainsi il est dit que l'on ne rencontre pas deux fois l'âme soeur.

  • Les princes de l'ailleurs.

    L' AVANT-SCENE, théâtre n° 909 - mai 1992 -

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    Il n'y a pas hélas, un seul monde sur terre mais plusieurs, certains étant des oiseaux migrateurs tandis que d'autres vivent en cage et la communication est difficile entre les deux espèces.

    L'action a pour lieu unique une plage entourée de dunes ... Deux enfants d'une dizaine d'années chacun sont attirés vers ce lieu car à proximité, s'est installé un camp de gens du voyage comme on les nomme quand on veut à la fois être précis tout en restant dans le vague … Dalila qui n'a rien ici d'une femme fatale est sur le point de se marier avec Santiago et connaît les affres de toute pucelle à la veille du mariage. D'autant que chez eux, la loi est stricte : une femme s'engage pour toute la vie,  pas comme ces gens de la ville chez qui le divorce est courant.

    Symboliquement du reste, Santiago passera une corde au cou de sa fiancée en lui disant, " ... je te fais aujourd'hui gardienne unique de mon âme et fleur unique de ma vie. " phrase qui peut faire sourire les citadins que nous sommes ...  

    Il s'ensuivra une remise de cadeaux, chacun accompagné d'un petit bouquet afin de souligner l'intention. Les trois familles sont ici représentées : gitans, manouches et roms, tous tziganes et à ce titre " seigneurs de l'univers des champs et des forêts " ( la liste n'est pas exhaustive.)

    Or, pour consacrer l'union des deux jeunes gens, la présence du sage Cristo el Pouro est requise. Seulement, voilà ! … où est-il passé ? L'homme a disparu et sans lui la mère de Dalila qui connaît la coutume pourtant et les paroles à prononcer, s'y refuse car hors lui, rien n'est possible. 

    Surviendra un ami, le maître d'école sorte de courroie de transmission entre les gadjé et tous ces nomades. La police n'est pas loin ainsi que la menace qu'elle représente, mais l'homme a réussi à les éloigner. (un temps) - Alors comme il faudra retrouver celui sans qui la cérémonie ne peut avoir lieu, l'instituteur et le fiancé partiront à sa recherche ce qui demandera beaucoup de temps et le désespoir envahira la fiancée qui attend le retour de son promis. Je ne vous raconterai pas la fin qui se veut aussi imprécise qu'onirique.

    Ensuite à vous de vous laisser porter par la poésie d'une existence si différente de la nôtre, pauvres sédentaires que nous sommes.

     

     

    ENTRETIEN avec l'AUTEUR -  

    S.A. -  A nouveau, dénoncer les injustices subies par un peuple me semble avoir été votre démarche en écrivant cette pièce, pouvez-vous me le confirmer ?

     

    R.P.- J'avais depuis longtemps essayé de réfléchir, de tenter de me donner quelques réponses même provisoires à ce qui fait qu'un être humain peut se mettre parfois en quête du sens de la vie et du sens de l'espace. En ce qui concerne ce dernier il m'est apparu que les tziganes étaient comme les fils du Vent donc de l'espace. J'avais conçu une histoire autour de ce thème quand j'ai rencontré Denise Schropfer animée de ces mêmes préoccupations et nous avons fusionné (si je puis dire) nos imaginaires. Mais de mon côté il y avait aussi la connaissance du martyre des tziganes pendant la dernière guerre, de la mort de 500 000 d'entre eux dans les camps nazis. Voilà ce qui a présidé à l'écriture des Princes joués à l'I.F.M. d' Etioles, à Evry et au festival d'Avignon en 1992.

     

    S.A. - Nous assistons ici à une histoire d'amour contrarié avec pour toile de fond, le mode de pensée de tout un peuple. Avez vous réellement rencontré cette communauté ?

     

    R.P. - Des roulottes de bohémiens (ainsi les appelait-on) passaient parfois dans mon village de Dordogne au temps de mon enfance, et j'ai rencontré à deux ou trois reprises leurs enfants. Leurs parents avec des fibres d'osier et des branches de noisetier fabriquaient des paniers qu'ils vendaient sur les marchés. Ces enfants avec lesquels j'avais échangé à l'insu de leurs parents et des miens n'avaient probablement rien d'exceptionnels mais moi qui ne quittais jamais mon village je trouvais extraordinaire cette façon d'aller sans cesse vers l'ailleurs. Ma pièce si elle est un hommage à ce peuple est en vérité un conte théâtral sur la liberté du voyage et le droit au refus de la sédentarisation.

     

    S.A. - Selon vous, l'humanisme est il utopique ?

     

    R.P.- Vaste débat philosophique ! Je dirai simplement que c'est pour moi le constant souci de développer le meilleur de soi et d'offrir ce meilleur aux personnes avec lesquelles on vit (je ne parle pas seulement de nos proches) et à tous ceux que l'on est appelés à rencontrer. Tolérance, respect de l'autre sont possibles. Mais quand on sait ce qu'il y a de violences voire de barbarie en l'homme, souvent incontrôlés il y a danger pour l'utopie, incarnation du meilleur de l'humain. 

     

     

  • La terre est à nous.

    L'AVANT SCENE Théâtre n° 854 (juillet 1989)

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    La terre est à nous, terme revendicateur frappé cependant d'ambiguïté puisque cela ne signifie nullement, la Terre est à tous. La possession de la terre, motif premier de toutes les guerres, terreau de tous les nationalismes et de toutes les revendications. Ici, il s'agissait encore de défendre les frontières menacées par la coalition des monarques frontaliers. Vous l'avez sans doute déjà compris, l'action se situe à l'époque de la Révolution, la grande, la seule, l' unique, celle de l'abolition des privilèges que nous avons rasés pour (faute de vigilence) perdre nos droits ensuite, mais nous n'en sommes pas là. 

    Empruntons la machine à remonter le temps et retrouvons nous en Périgord en cet An de Grâce pour certains, de disgrâce pour les autres, c'est à dire en 1789.

    Nos ancêtres, las de régler la taille, la dîme et la gabelle se sont un jour révoltés. 

    L'homme a une force d'endurance qui peut durer des siècles mais lorsque sa patience usée jusqu'à la corde, craque la contestation prend de l'ampleur, se transforme en émeute et peu à peu en Révolution. Le moyennageux " travaille, obéis et tais-toi " ancêtre de l'actuel " travailler plus pour gagner ... moins "  ne pouvait alors être accepté plus longtemps. 

    La terre appartient à ceux qui la font fructifier, autre formule qui eut ses heures de gloire alors que le problème est plus complexe que cela, bien sûr, chacun ayant de bonnes raisons pour conserver ce qu'il possède. 

    Les personnages de cette pièce sont hauts en couleurs et chacun expose le bien fondé de ses choix à une époque où il était devenu très dangereux d'affirmer quoi que ce soit, la Veuve ayant tendance à régler tous les problèmes.

    La pièce a valeur d'épopée, nous éclairant sur les raisons de chacun et ils en ont tous de bonnes, qu'il s'agisse de l'extrémisme de Machecoul, de la lucidité de Louise, de la compréhension du Comte ou de l'engagement raisonné de Flutiau, ils déclenchent tous notre respect. 

    Alors une question se pose maintenant, avons nous conservé ce coeur au ventre sans lequel le Destin est un vain mot ? 

     

     

    INTERVIEW de l'AUTEUR,

     

     

    S.A. - Du fait de la documentation historique importante, quelle fut la durée de préparation et d'écriture ?

     

    R.P. - La Terrre est à nous est une fresque historique qui m'a été commandée à l'occasion du bicentenaire de la Révolution en Périgord par Pierre Orma du Théâtre de la Vache Cruelle en 1988. La ville de Périgueux et le conseil général de la Dordogne voulaient à l'occasion de ce bicentenaire inscrire dans leur programme un spectacle théâtral. Quelques historiens s'étaient proposés pour écrire un texte mais Pierre Orma a fait valoir qu'il y avait un auteur dramatique du département qui était en l'occurrence plus apte à réaliser ce travail. Je me suis attelé à la tâche de janvier 1988 à la mi-août de la même année soit 7 mois donc pour écrire les 7 époques de la pièce le tout ayant une durée de 5h.30. Par la suite je l'ai évidemment réduite et au final ce fut un spectacle de presque 3 heures. 

     

    S.A. - Quels ouvrages historiques avez vous été amené à consulter ?

     

    R.P. - J'ai lu deux ouvrages traitant directement de la Révolution en Périgord, un de Madame Cocula, universitaire et de l'abbé Rocal. Et puis la révolution française de Jules Michelet (une somme captivante d'un style flamboyant) 

     

    S.A. - Une touche d'humour est constituée par cette grève du sexe préconisée par cet abbé qui avait peut-être lu Aristophane ?

     

    R.P. - L'histoire, les personnages sont entièrement imaginaires. Parmi eux il y a ce curé qui est bien du genre " faites ce que je dis mais ne faites pas ce que je fais." Il y avait un comité d'historiens chargés de vérifier qu'en prenant le chemin de l'invention, je n'avais pas commis d'erreurs historiques. L'un de ses membres était un professeur d'Histoire, directeur d'une école privée. Il a trouvé que ce personnage du curé était un peu excessif mais m'a t-il dit, " ses répliques sont si spirituelles qu'il faut le garder tel qu'il est." 

     

  • Le Nègre qui riait et qui dansait

    L' AVANT SCENE théâtre N° 870

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    Les blancs du continent ont besoin de sucre et de café, de tabac, or comme pour récolter tout cela, la main d'oeuvre blanche est inapte à supporter le climat, il faut des gens du cru et une fois achetés, les noirs feront l'affaire ! 

    Un vieil africain va raconter cela à cet adolescent pour que ce dernier sache ce qui s'est passé, afin que la mémoire de ces temps maudits ne se perde pas. 

    Il va donc lui raconter l'histoire du nègre qui riait et qui dansait. 

    Il s'appelait Samba était jeune fort et beau, sa compagne, sa splendide amoureuse avait pour nom Lilia, ils étaient gais, libres et insouciants, jusqu'au jour où Louango, cet africain vêtu à l'européenne, les a vendus afin qu'ils soient réduits en esclavage. Eux et quelques autres ont été capturés, enchaînés, marqués au fer rouge, c'est ce que l'on nommait le trafic de bois d'ébène, cette main d'oeuvre bon marché sur laquelle les colons avaient droit de vie et de mort. 

    Le vieil africain insiste pour raconter cela au jeune garçon noir insouciant, incapable d'imaginer ce qui s'était passé. Qui le pourrait du reste ? 

    Vous êtes des sauvages disait le capitaine négrier avant de les conduire, aux futurs acheteurs, les planteurs qui avaient besoin de bras.

    A l'issue de la vente, l'armateur satisfait fera cadeau de Lilia au capitaine et elle disparaîtra du regard de Samba devenu esclave à vie pour lequel la mort est devenue la seule perspective de délivrance. Il faudra que beaucoup de temps s'écoule, pour que l'abolition de l'esclavage ait lieu, peu à peu, pays par pays, jusqu'à ce que la déclaration universelle des droits de l'homme mette un point final à cette ignominie.

    La distribution est nombreuse et mixte de préférence ... Des représentations eurent lieu à Dakar et à Gorée et ne serait-ce qu'en lisant le texte, on imagine aisément l'émotion que le public a dû ressentir à son écoute. 

    Cette pièce tombe à point nommé car l'époque actuelle a inventé une autre forme d'esclavage, plus subtil puisque consenti. Les colons ne vont plus obligatoirement sur les terres africaines, la main d'oeuvre se déplaçant de son plein gré en Europe et sans doute faudra t-il encore quelques générations pour que la référence pianistique : une blanche vaut deux noires ne trouve plus son application simplificatrice.

     

    ENTRETIEN avec l'AUTEUR,

     

    S.A. - Dénoncer ce que fut le colonialisme, d'autres l'ont fait avant vous. Quelle fut en écrivant cette pièce votre motivation profonde ?

     

    R.P - Là encore il s'agit d'une commande et cette fois du Conseil Général de l'Hérault initiée par Odette Michel animatrice du Printemps des comédiens et qui intervenait dans de nombreux établissements scolaires du département. J'avais préalablement à cette commande écrit en 1988 le scénario et les dialogues d'un docu-fiction de 52mn réalisé par Pierre Pommier pour la 7 et la 3 et qui évoquait le commerce triangulaire de la traite.  Ce docu-fiction a pour titre " Le voyage sans retour " - Triangulaire cela voulait dire départ des bateaux d'armateurs français de Nantes ou de Bordeaux vers Dakar prise en charge des noirs capturés à l'île de Gorée, lesquels avaient été vendus par quelques puissants de leur pays avant d'être dirigés vers les Antilles où ils étaient achetés par des planteurs de canne à sucre qui les réduisaient à l'esclavage toute leur vie. J'ai repris ce scénario je l'ai transformé en fresque historique et tragique. Ma motivation était celle-ci : j'ai une image de mon pays formée dans mon esprit par des grandes voix comme celle de l'abbé Grégoire, de Victor Hugo et des grands humanistes en un mot. Donc, j'ai toujours été anti-colonialiste et la traite est pour moi un scandale qu'on ne cessera jamais assez de dénoncer. Sous d'autres formes elle existe encore aujourd'hui.

     

    S.A. - Spike Lee a tourné des films, persuadé que les blancs ne peuvent parler du problème noir , ne l'ayant pas vécu de l'intérieur. Quelles sont vos objections à cela ?

     

    R.P.- Votre question ne me surprend pas. D'ailleurs, lorsque la pièce a été présentée à Dakar et au Cameroun d'aucuns se sont étonnés que ce soit un blanc qui l'ait écrite. Selon moi tout écrivain a le droit de s'exprimer même sur un sujet qui n'est pas de son pays ou de sa race dès lors où il le porte en lui en toute sincérité et quand il s'agit d'un sujet universel. 

     

    S.A.- Avez-vous assisté aux représentations en Afrique et quels sont ces " chocolats littéraires " qui se déroulèrent dans l'Hérault ?

     

    R.P. - Non, je n'ai pas assisté hélas, aux représentations africaines autrement que par le biais d'une vidéo. Quant aux " Chocolats littéraires "  il s'agit d'une manifestation organisée par cette même Odette Michel; la pièce jouée par des adolescents a été donnée dans différentes villes de l'Hérault au cours d'une tournée que j'ai accompagnée et à l'île de Gorée ce sont des adolescents sénégalais qui l'ont représentée mais je n'étais pas du voyage.